Montreuillon
Montreuillon, un village millénaire au cœur de l'Europe
Logo Montreuillon

 

Accueil

 

Montreuillon-culturel - (https://montreuillon.eu)

Environnement

Gestion des bassins versants

Montreuillon entre Yonne et Loire !

Le domptage de l'enfant terrible


 

 

Au commencement était l'Yonne ... et la ligne de partage des eaux !

L'Yonne prend naissance à 738 m d'altitude sur les pentes du Mont Preneley, dans le Haut-Morvan granitique.

La source se cache au coeur des hêtraies de la forêt de Gravelle, dans une modeste tourbière.

Le cours d'eau émerge à l'Est du mont Preneley et à proximité de la ligne de partage des eaux6 qui sépare le bassin versant1 ligérien (celui de la Loire) et icaunais (celui de l'Yonne et par extension de la Seine) !

La rivière s'écoule alors vers le Nord sur une pente rapide pour entrer 35 km plus loin par l'Est dans la caldeira13 de Montreuillon (240 m).

Elle repart alors vers le Nord sur une pente qui s'abaisse encore de 44 m sur les 15 km qui séparent le village de l'agglomération de Corbigny (196 m) où elle quitte définitivement le Haut-Morvan et le granite.

Cette situation géographique particulière a engendré au cours des siècles un aménagement des bassins versants très actif qui a modelé et qui explique les paysages d'aujourd'hui.

Toute la commune est située sur le granite et du coté Yonne à l'exception d'"un irréductible hameau gaulois", l'Huis Seuillot sans doute héritier d'une communauté taisible très indépendante.

Ce lieu-dit est situé à quelques centaines de mètres de la ligne de partage des eaux, mais du coté Loire : quand un autochtone de L'Huis Seuillot arrose son jardin avec l'eau de la commune, il la prélève du coté Seine et la donne à la Loire et l'océan Atlantique en privant ainsi l'Yonne et la Manche du précieux liquide !

 

Le flottage

Le flottage à bûches perdues

La rivière a été aménagée dès 1547 pour approvisionner Paris situé à plus de 300 km de là, en bois de chauffage : c'était l'aventure du flottage.

Les bûches de 3 pieds 6 pouces (1.14 m) étaient jetées "à bûches perdues"4 jusqu'à Lucy et Clamecy et regroupées ensuite en train de bois de 75 m de long dans la partie navigable.

Cela a entrainé la construction de beaucoup de retenues d'eau dans la région ou simplement le rehaussement des "gauthiers"6 existant : quand il ne pouvait pas être acheminé par charettes à boeufs, le bois était flotté pour être amené jusqu'à l'Yonne.

Les vannes étaient alors ouvertes en amont des ruisseaux pour faire monter leur niveau d'eau.

En décembre-janvier une crue artificielle était provoquée en ouvrant simultanément toutes les retenues du Morvan, les "ports de jetage"11 mettaient les bûches à l'eau et elles étaient entrainées ainsi en vrac jusqu'à Lucy-sur-Yonne.

C'était le flot le plus important : le bois devait être amené avant le 15 avril pour permettre la construction des "trains", leur mise à l'eau avant l'été et la livraison du bois quai de la rapée à Paris.

Au printemps, un deuxième flot plus modeste était provoqué pour dégager les ports du Haut-Morvan mais il était arrêté en amont de Clamecy.

A Montreuillon, au xixe siècle, Léonard Girard était "garde-rivière" et devait organiser et surveiller le bon déroulement des opérations pour la Compagnie Haut-Morvan, mais c'est une autre histoire ...!

 

Le Canal du nivernais

Malgré cela, Paris manqua de bois lors de l'hiver 1782-83 et il fut alors étudié la possibilité d'exploiter la forêt plus largement en particulier en Bazois situé à quelques kilomètres seulement de Montreuillon.

Mais pour cela il fallait faire franchir au bois cette fameuse ligne de partage des eaux : le 10 avril 1784, le roi Louis XVI signa le projet de creusement du canal du Nivernais prévu entre Baye et Auxerre et les travaux commencèrent à La Collancelle en 1784.

De projets en projets, les objectifs ont évolué vers la construction d'une véritable voie d'eau destinée à la navigation : il fut prolongé jusqu'à Chatillon en Bazois et enfin jusqu'à Decize.

Des travaux titanesques furent entrepris pour relier le Bazois à l'Yonne : percement du massif de ryolithe de La Collancelle, les "échelles de Sardy" et ses 16 écluses consécutives, ...

 → En savoir plus sur le canal du nivernais  …

 

La rigole d'Yonne

Pourtant en 1841 lors de l'inauguration, les ingénieurs se sont rendu compte que les réservoirs de Baye et de Vaux, même surélevés grâce à de nouvelles digues, ne suffisaient pas à l'alimentation régulière du bief de partage des eaux.

Ils ont mis en oeuvre le creusement de la "rigole d'Yonne" qui captait l'eau de l'Yonne au pont de "Pannessière"9 grâce à un barrage à aiguilles10.

A Montreuillon, la rigole devait franchir le ruisseau des Ruères (aqueduc de Marrigny) et la vallée de l'Yonne grâce au fameux aqueduc de Montreuillon de 33m de haut pour acheminer l'eau jusqu'à Baye. L'ensemble fut rendu opérationnel en 1843 !

 → En savoir plus sur la rigole d'Yonne  …
 → En savoir plus sur les aqueducs de Montreuillon  …

 

aqueduc de Marigny
l'aqueduc de Marigny
Sur l'aqueduc de Montreuillon
La rigole sur l'aqueduc de Montreuillon
l'aqueduc de Montreuillon
L'aqueduc de Montreuillon
route de l'Huis Seuillot
L'huis Seuillot
après le haut de la côte
c'est le bassin de la Loire

 

 

haut

 

La régularisation du cours de l'Yonne

Le barrage de Pannecière

Les périodes d'étiage3 perturbaient fortement les activités du Morvan, celles de la région parisienne et l'approvisionnement en eau potable de la capitale.

Dès début du xixe siècle, en 1824 l'inspecteur Poirée préconisa la création de grands réservoirs qui interviendraient en "support d'étiage".

Des propositions les plus diverses furent envisagées, mais ce n'est qu'après la crue centennale de l'Yonne catastrophique en 1910 et l'innondation de Paris2 que le projet fut sérieusement remis à l'étude.

Il ne s'agissait plus d'un simple support d'étiage mais d'un projet de contrôle complet du débit de l'Yonne.

La première guerre mondiale retarda les opérations.

En 1924 une nouvelle crue rappela l'opportunité du projet et c'est le 8 septembre 1929 que le projet de barrage de Pannecière fut reconnu d'utilité publique et doté d'un budget.

Il a quand même fallu attendre 20 ans, la fin de la deuxième guerre mondiale et 1949 pour que l'ouvrage soit achevé et la mise en eau effective !

 → En savoir plus sur le lac-réservoir de Pannecière  …

Bassins-versants, une gestion "à vue" étalée dans le temps

L'aménagement des bassins versants dans la haute vallée de l'Yonne et Montreuillon n'a jusqu'au milieu du xxe siècle jamais fait l'objet d'un plan stratégique de développement durable de la région à long terme.

Il s'agissait essentiellement de réponses à des difficultés immédiates concernant la capitale.

Entre le XVIe et le début du XXe siècle

Il fallait chauffer Paris ; l'exploitation de la forêt morvandelle et l'acheminement du bois par flottage était une réponse :

  • aménagement de multiples retenues d'eau pour faire fonctionner le flottage
  • creusement du canal du nivernais avec franchissement de la ligne de partage des eaux entre le bassin de la Loire et celui de la Seine
  • aménagement de la rigole d'Yonne avec barrage et prise d'eau au niveau du "pont de pannessière" et aqueducs dont le grand pont de Montreuillon

Fin XIXe siècle à la moitié du XXe siècle

L'objectif était cette fois de réguler le cours de l'Yonne pour assurer un support d'étiage et l'approvisionnement en eau de Paris tout en protégeant la ville des innondations :

  • construction du barrage de Pannecière-Chaumart avec installation d'une usine electrique et modification de la prise d'eau de la Rigole d'Yonne

Aujourd'hui

Entretien et renforcement des ouvrages et enfin , la prise en compte de l'intérêt des morvandiaux (activités touristique).

L'assainissement dans les communes riveraines du lac et le développement de cyanobactéries émettant des cyanotoxines.

Bien d'autres questions sont ou doivent être soulevées : l'enrésinement des forêts et son impact sur l'eau par exemple, ...

Enfin, la mise en place de textes d'application d'une directive européenne sur la "continuité écologiques" qui fait pour le moins couler beaucoup d'encre … !

 

 

haut

 

 

Michel Partiot Académie du Morvan ‑  janvier 2015

 

Bibliographie

  • Beaujeu-Garnier J., 1950, Le Morvan et sa bordure Ed. PUF, 288 p.
  • Bonnamour J., 1966, Le Morvan - La terre et les hommes Ed. PUF, 454 p.
  • Bruley J., 1973, Le Morvan coeur de la France - Géographie, Histoire, Littérature, t. I, Ed. La Morvandelle, 571 p.
  • Bruley J., 1982, Les gondoliers du Morvan Ed. La Morvandelle, 287 p.
  • Epin C. Académie du Morvan, 1989. Montreuillon - La durée et l'instant, Ed. Parimage, 247 p.
  • Guillien E. Académie du Morvan, 2001, Les propriétaires forestiers morvandiaux ont assuré une partie de l'approvisionnement de Paris en bois de chauffage de 1549 à 1939, Ed. Les traines-Bûches du Morvan, 87 p.
  • Guillien E. Académie du Morvan, 2007, Quand la"moulée" du Morvan descendait à Paris t1 - Les "courrues" du Morvan aux Vaux-d'Yonne, Ed. Les traines-Bûches du Morvan, 319 p.
  • Guillien E. Académie du Morvan, 2009, Quand la"moulée" du Morvan descendait à Paris t2 - Les "éclusées" des Vaux-d'Yonne à Paris, Ed. Les traines-Bûches du Morvan, 255 p.
  • Michel-Lévy A., 1898, Le Morvan et ses attaches avec le massif central. In: Annales de Géographie, t. 7, n°36:404-428.
  • Michel-Lévy A., 1899, Le Morvan et ses attaches avec le massif central. In: Annales de Géographie, t. 8, n°37:6-21.

Notes

  1. Bassin versant : aire où se rassemblent les eaux qui se déversent dans un même exutoire (rivière, fleuve, mer).
  2. Crue centennale de 1910 : l'OCDE estime que la même crue aujourd'hui causerait au minimum pour 30 milliards d'Euros de dégats, une bonne partie des activités de la France seraient paralysées, sans compter les répercutions sociales que cela entrainerait !
  3. Étiage : abaissement exceptionel du niveau de l'eau; sinon la période où le niveau de l'eau est habituellement le plus bas correspond aux "basses eaux". L'étiage est aussi parfois définit comme le point le plus bas du niveau de l'eau.
  4. Flottage à bûches perdues : le bois de chauffage coupé à 1,14 m et marqué était jeté dans l'Yonne alors que tous les barrages étaient ouverts simultanément pour provoquer une vague suffisante pour faire flotter les bûches jusqu'à Clamecy. Là tout était assemblé en "train" (grands radeaux) et acheminé sur Paris
  5. Gauthier (ou gautier) : petit barrage en bois permettant de régler la hauteur d'eau lors du flottage
  6. Ligne de partage des eaux : limite entre plusieurs bassins versants
  7. Mouille : quand la roche-mère est imperméable et que le sol composé de granites altérés et d'argiles est peu profond, l'eau de la nappe phréatique circule très près de la surface et ressort parfois sous forme d'un marécage ou même d'une mare
  8. Orographie : domaine de la géomorphologie et de la géographie physique concernant la description des montagnes et par extension, plus généralement du relief
  9. Pannessière : nom du pont qui existait avant la construction du barrage. Aujourd'hui, l'orthographe Pannecière est retenue
  10. Pont à aiguilles : système inventé par l'ingénieur Antoine Poirée (Charles Antoine François Poirée, 1785-1873) en 1834 ; le barrage est composé de plusieurs centaines de planches de bois de 7 à 10 cm d'épaisseur sur 2 m à 2,50 m de long ("d'aiguilles") maintenues les unes contre les autres. Le débit du cours d'eau est ainsi réglé finement et lors du flottage tout est enlevé. Cette invention valut à son auteur la Grande Médaille d'Honneur lors de l'exposition universelle de1855.
  11. Ports de jetage : Flottage - le bois était amené depuis les chantiers forestiers par charette ou par les ruisseaux grâce aux étangs situés en amont qui étaient lachés pour créer des crues artificielles. Le bois parvenait ainsi jusqu'à l'Yonne, jusqu'aux "ports de jetage" où il était stocké pour y être marqué et jeté à l'eau en décembre-janvier et en mars-avril lors des "flots". Il était ensuite récupéré à Clamecy.
  12. Flots : Ils consistaient à créer une crue artificielle en ouvrant simultanément les vannes de tous les étangs et barrages. En décembre-janvier il avait plu suffisamment pour que toutes les retenues d'eau soient pleines, c'était le flot principal, celui qui allait le plus loin, entre Clamecy et Lucy-sur-Yonne ). Il fallait faire en sorte la moulée soit complètement acheminée avant le 15 avril pour y être assemblée en "train". Ensuite en mars-avril un flot moins important était arrêté avant Clamecy pour ne pas perturber la construction des "trains". Certaines années, il pouvait y avoir 3 à 4 flots successifs.
  13. Ryolithe : roche magmatique (de couleur rouge dans le cas de Montreuillon) effusives ayant traversé les couches de granite au permien (il y a 300 millions d'années)
  14. caldeira de Montreuillon : il y a 260 millions d'années, une remontée de lave rhyolitique acide traversa le vieux socle granitique hercynien provocant des nuées ardentes (aerosols volcaniques composé de gaz, de cendres et de blocs de rhyolithe et d'ignimbrites). En se refroidissant un dôme se forma et s'effondra dans la chambre magmatique vide en créant en surface une "caldeira" (appelée aussi caldera), une dépression circulaire à fond plat.

 

haut

 

 

Accueil